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Le rêve de Zozime l'alchimiste (IIIème s. après J.-C) et la révélation de la Pierre Philosophale



En considérant que la Pierre est l'Esprit divin lui-même, et cet Esprit est celui qui nous meut également, nous devons entendre ce récit sur plusieurs niveaux d'interprétation. Nous avons retranscrit le texte en entier afin que vous puissiez apprécier la saveur du rêve. Plus tard, il fit d'autres rêves encore qui devoileront les étapes et les secrets du Grand Oeuvre, chaque rêve équivaut à une inspiration de la part des dieux dont le contenu révèle une part du Secret de la fabrication de la Pierre. Voici son rêve :


1. La composition des eaux, le mouvement, l’accroissement, l’enlèvement et la restitution de la nature corporelle, la séparation de l’esprit d’avec le corps,[2] et la fixation de l’esprit sur le corps ; les opérations qui ne résultent pas de l’addition de natures étrangères et tirées du dehors, mais qui sont dues à la nature propre, unique, agissant sur elle-même, dérivée d’une seule espèce, ainsi que (l’emploi) des minerais durcis et solidifiés, et des extraits liquides du tissu des plantes ; tout ce système uniforme et polychrome comprend la recherche multiple et infiniment variée de toutes choses, la recherche de la nature, subordonnée à l’influence lunaire et à la mesure du temps, lesquelles règlent le terme et l’accroissement suivant lesquels la nature se transforme.


2. En disant ces choses, je m’endormis ; et je vis un sacrificateur qui se tenait debout devant moi, en haut d’un autel en forme de coupe. [3] Cet autel avait quinze marches à monter. Le prêtre s’y tenait debout, et j’entendis une voix d’en haut qui me disait :


« J’ai accompli l’action de descendre les quinze marches, en marchant vers l’obscurité, et l’action de monter les marches, en allant vers la lumière. C’est le sacrificateur qui me renouvelle, en rejetant la nature épaisse du corps. Ainsi consacré prêtre par la nécessité, je deviens un esprit. »


Ayant entendu la voix de celui qui se tenait debout sur l’autel en forme de coupe, je lui demandai qui il était. Et lui, d’une voix grêle, me répondit en ces termes :


« Je suis Ion, [4] le prêtre des sanctuaires, et je subis une violence intolérable. Quelqu’un est venu au matin précipitamment, et il m’a violenté, me pourfendant avec un glaive, et me démembrant, suivant les règles de la combinaison. Il a enlevé toute la peau de ma tête, avec l’épée qu’il tenait (en main) ; il a mêlé les os avec la chair [5] et il les a fait brûler avec le feu du traitement. C’est ainsi que j’ai appris, par la transformation du corps, à devenir esprit. Telle est la violence intolérable (que j’ai subie). »


Comme il m’entretenait encore, et que je le forçais de me parler, ses yeux devinrent comme du sang, et il vomit toutes ses chairs. Et je le vis (changé en) petit homme contrefait, se déchirer lui-même avec ses propres dents, et s’affaisser.


3. Rempli de crainte, je m’éveillai et je songeai : « N’est-ce-pas là la composition des eaux ? » Je fus persuadé que j’avais bien compris ; et je m’endormis de nouveau. Je vis le même autel en forme de coupe, et, à la partie supérieure, de l’eau bouillonnante et beaucoup de peuple s’y portant sans relâche. [6] Et il n’y avait personne que je pusse interroger en dehors de l’autel. Je monte alors vers l’autel, pour voir ce spectacle. Et j’aperçois un petit homme, un barbier blanchi par les années, qui me dit :


- « Que regardes- tu ? »


Je lui répondis que j’étais surpris de voir l’agitation de Peau et celle des hommes brûlés et vivants. Il me répondit en ces termes :


- « Ce spectacle que tu vois, c’est l’entrée, et la sortie, et la mutation. »


Je lui demandai encore :


- « Quelle mutation ? » Et il me répondit :


- « C’est le lieu de l’opération appelée macération ; car les hommes qui veulent obtenir la vertu entrent ici et deviennent des esprits, après avoir fui le corps. »


Alors je lui dis :


- « Et toi es-tu un esprit ? » Et il me répondit :


- « Oui un esprit et un gardien d’esprits. »


Pendant notre entretien, l’ébullition allant en croissant, et le peuple poussant des cris lamentables, je vis un homme de cuivre, tenant dans sa main une tablette de plomb. [7] Il me dit les mots suivants, en regardant la tablette :


- « Je prescris à tous ceux qui sont soumis au châtiment de se calmer, de prendre chacun une tablette de plomb, d’écrire de leur propre main, et de tenir les yeux levés en l’air et les bouches ouvertes, jusqu’à ce que leur vendange [8] soit développée ».


L’acte suivit la parole et le maître de la maison me dit :


- « Tu as contemplé, tu as allongé le cou vers le haut et tu as vu ce qui s’est fait ».


Je lui répondis que je voyais, et il me dit :


- « Celui que tu vois est l’homme de cuivre ; c’est le chef des sacrificateurs et le sacrifié, celui qui vomit ses propres chairs. L’autorité lui a été donnée sur cette eau et sur les gens punis ».


4. Après avoir eu cette apparition, je m’éveillai de nouveau. Je lui dis : « Quelle est la cause de cette vision ? N’est-ce donc pas là l’eau blanche et jaune bouillonnante, l’eau divine ? » Et j’ai trouvé que j’avais bien compris. Je dis qu’il est beau de parler et beau d’écouter, beau de donner et beau de recevoir, beau d’être pauvre et beau d’être riche. Or, comment la nature apprend-elle à donner et à recevoir ? L’homme de cuivre donne et la pierre liquéfiée reçoit ; le minéral donne et la plante reçoit ; les astres donnent et les fleurs reçoivent ; le ciel donne et la terre reçoit ; les coups de foudre donnent le feu qui s’élance. Dans l’autel en forme de coupe, toutes choses s’entrelacent, et toutes se dissocient, toutes choses s’unissent, toutes se combinent, toutes choses se mêlent, et toutes se séparent ; toutes choses sont mouillées, et toutes sont asséchées, toutes choses fleurissent et toutes se déflorent. En effet, pour chacune c’est par la méthode, par la mesure, par la pesée exacte des quatre éléments que se fait l’entrelacement et la dissociation de toutes choses ; aucune liaison ne se produit sans méthode. Il y a une méthode naturelle, pour souffler et pour aspirer, pour conserver les classes stationnaires, pour les augmenter et pour les diminuer. Lorsque toutes choses, en un mot, concordent par la division et par l’union, sans que la méthode soit négligée en rien, la nature est transformée car la nature, étant retournée sur elle-même, se transforme. Il s’agit de la nature et du lien de la vertu dans l’univers entier.


5. Bref, mon ami, bâtis un temple monolithe, semblable à la céruse, à l’albâtre, n’ayant ni commencement ni fin dans sa construction. Qu’il y ait à l’intérieur une source d’eau très pure, étincelante comme le soleil. Observe avec soin de quel côté est l’entrée du temple et prends en main une épée ; cherche alors l’entrée, car il est étroit, c'est le lieu où se trouve l’ouverture. Un serpent est couché à l’entrée, gardant le temple. Empare-toi de lui ; tu l’immoleras d’abord ; dépouille-le, et prenant sa chair et ses os, sépare ses membres ; puis réunissant les membres avec les os, à l’entrée du temple, fais-en un marchepied, monte dessus, et entre. Tu trouveras là ce que tu cherches. Le prêtre, cet homme de cuivre, que tu vois assis dans la source, rassemblant (en lui) la couleur, ne le regarde pas comme un homme de cuivre ; car il a changé la couleur de sa nature et il est devenu un homme d’argent. Si tu le veux, tu l’auras bientôt (à l’état d’) homme d’or. [9]


6. Ce préambule est une entrée destinée à te manifester les fleurs des discours qui vont suivre (c’est-à-dire) la recherche des vertus, du savoir, de la raison, les doctrines de l’intelligence, les méthodes efficaces, les révélations qui éclaircissent les paroles secrètes. Ainsi la vertu poursuit le Tout, en son temps et avec méthode,


7. Que signifient ces mots :

« La nature triomphe des natures ? »

Et ceci : « Au moment où elle est accomplie, elle est prise de vertige ? »

Et encore : « Resserrée dans la recherche, elle prend le visage commun de l’œuvre du Tout, et elle absorbe la matière propre de l’espèce ? »

Et ceci : « Tombée ensuite en dehors (de) sa première apparence, elle croit mourir ? »

Et ceci : « Lorsque, parlant une langue barbare, elle imite celui qui parle la langue hébraïque ; alors, se défendant elle-même, la malheureuse se rend plus légère en mélangeant ses propres membres ? »

Et ceci : « L’ensemble liquide est mené à maturité par le feu ? »


8. Appuyé sur la clarté de ces conceptions de l’intelligence, transforme la nature, et considère la matière multiple comme étant une. N’expose clairement à personne une telle propriété ; mais suffis-toi à toi-même, de crainte qu’en parlant, tu ne te détruises toi-même. Car le silence enseigne la vertu, il est beau de voir les mutations des quatre métaux [le plomb, le cuivre l’asèm (ou l’argent), l’étain], changés en or parfait.


Prenant du sel, mouille le soufre, de façon à amener la masse en consistance de cire mielleuse. Enchaîne la force de l’un et l’autre ; ajoutes-y de la couperose et fabriques-en un acide, premier ferment de la couleur blanche, tiré de la couperose. Avec ces (substances) tu amèneras par degré le cuivre dompté à l’apparence blanche. Fais distiller par la cinquième méthode, au moyen des trois vapeurs sublimées. Tu trouveras l’or attendu. Voilà comment en domptant la matière tu obtiens l’espèce unique, tirée de plusieurs espèces.


Alambic en cuivre

 

Source :

Titre : Zosime de Panopolis - Mémoires authentiques : tome IV-1

Auteur : Marcellin Berthelot

Editions : Les Belles Lettres

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