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Photo du rédacteurDaniel Shoushi

Aux frontières du réel. Qui sommes-nous?


Victor Hugo, l'Ombre du mancenillier

1.Victor Hugo, l'Ombre du mancenillier



Qu'est-ce que le réel?

Nous pouvons l'appréhender de plusieurs manières, par l'expérience sensorielle, par l'émerveillement de nos émotions et par la délectation intellectuelle. En sommes-nous sûr? Puisque nous sommes constituer sur un plan du réel dont la conscience humaine se découvre à travers ses expériences sensorielles, ses émotions et ses pensées nous ne pouvons penser autrement le réel. Le biologiste Jakob von Uexküll a dévoilé que ce qui existe pour le vivant, ce n’est pas le donné brut de l’environnement, une Nature qui se présenterait là devant nous tel un objet qui évoluerait indépendamment de nous, mais ce qu’il choisit et élabore à partir de cette matière première abstraite en s’élaborant soi-même, à savoir son milieu propre. C'est à travers une co-évolution que chaque être vivant évolue au sein d'un environnement qui lui est propre, il ne s'adapte pas puisqu'il se situe dans un croître-ensemble. Chaque conscience est donc un apparaître dont la nature ne peut être séparé du lieu où elle a prit naissance. C'est la raison pour laquelle il ne peut exister de conscience sans matière, que la matière soit dense ou subtile. Rompant avec l'approche dualiste et mécaniciste du monde, Jakob von Uexküll montre que le vivant n'est pas une machine, ni même un assemblage de molécules qui se sont constituées au hasard des rencontres, lequel n'est pas mus seulement par des stimuli comme l’eût voulu le béhaviorisme, mais, en tant que sujet, interprète les signes de leur milieu d’une façon particulière. Le milieu, c’est la réalité comme elle apparaît concrètement pour chaque être vivant et chaque sujet, c’est-à-dire existe pour l’être concerné. Cela signifie que les choses d’un milieu n’existent qu'à travers une conscience qui l'observe. En conséquence, la conscience porte son attention non plus sur un objet (la Nature) mais sur notre relation à cet objet. Nous comprenons donc que le réel contient toutes les potentialités non encore manifestées pour un sujet alors que la réalité concerne le vécu qui existe pour un sujet. Un réel et une infinité de réalité. Quant au désir humain, il est le moteur de ce qui nous fait être. Nous dirions aujourd'hui notre énergie fondamentale.


Au sein de note société, la faculté imaginative n'a pas très bonne figure ou bien n'est pas comprise telle qu'elle devrait l'être. C'est-à-dire que nous la percevons comme une faculté fantasmagorique, celle qui nous dévoile le contenu de l'inconscient et ses images grotesques telle que la psychanalyse freudienne l'entrevoit ou encore une partie des philosophes, à laquelle personne ne peut avoir confiance. La médecine moderne par le biais de la neurologie et de la psychiatrie, dont l'approche ne diffère pas de ces derniers, ne laisse aucune place à l'imagination comme faculté créatrice de réalité. Seuls les artistes, et les physiciens, comprennent que la faculté imaginative est bien plus qu'une faculté, et que sa modalité foncière c'est d'être la porte du réel. Les médecins ont inventé au cours du temps, du fait de leur incapacité à comprendre la fonction de la porte du réel, des dénominations diverses lorsque l'imagination déborde les fonctions normatives de la société. On parle alors d'hallucinations, de fantasmagories, de délires, de perte de repères, de schizophrénies, etc. En fait, l'imagination remplit le rôle d'interface du réel pour la conscience dont les images qui s'y reflètent appartiennes entièrement à la réalité du sujet.


Il en est ainsi parce que l'imagination n'a pas sa place parmi nous, certaine personne parle même de "folle du logis". Lorsque nous regardons de plus prêt aux définitions données par les psychiatres aux pathologies associées à l'imagination, nous découvrons qu'en fait se cache une ignorance camouflée utilisant un jargon scientifique. Qu'est-ce qu'une hallucination? C'est percevoir une réalité qui n'existe pas. Des perceptions sensorielles qu'elles soient auditives, gustatives ou encore visuelles sont excitées sans qu'aucun stimulus extérieur ne se manifeste. Ceci annonce un état pathologique. Nous affirmons que cette taxinomie psychiatrique empreinte le chemin du réductionnisme, elle cloisonne l'homme dans des carcans dogmatiques bien que la médecine se dise adogmatique. Afin d'élaborer une nouvelle approche de l'imagination en médecine, il faudrait l'associer aux différents états de conscience. C'est-à-dire que nos différents états de conscience auxquels sont assimilés différentes ondes cérébrales, autrement dit les ondes Delta, Thêta, Alpha et Bêta, accompagnent différents états sensoriels et donc de réalité. En conséquence, lorsque nous changeons d'état de conscience notre état d'être global est altéré, et chaque état s'ancre dans une réalité particulière. C'est au sein de ces oscillations que nous devons intégrer les hallucinations. Pour ce faire, il faut entendre que chaque état d'être qui oscille fluctue sur des bandes de fréquence dont la nature du réel varie en fonction de cet état. Une lecture verticale de ces différents états de conscience nous offre la possibilité d'entrevoir la fonction imaginative, elle remplie le rôle de récepteur de réalité, qui, comme un miroir reflète les différentes réalités vécues et les projettent au dehors. Mais elle remplit également le rôle d'activateur de réalité. Les conséquences de cette affirmation sont bouleversantes, puisque les hallucinations sont bel et bien réelles mais elles appartiennent à un autre état de conscience dont l'activité est sous-jacente à la conscience de veille. Nous postulons que les hallucinations s'activent à l'état de conscience de veille alors qu'elles appartiennent à une normalité onirique, c'est-à-dire que l'état de conscience onirique lié à d'autre ondes cérébrales entrent en résonance avec un état de conscience de veille et interfère avec cet autre réalité. Deux plans du réel qui se croisent et se rencontrent. Il en est de même pour toutes les activités dites "anormales", "pathologiques", touchant à la sphère de l'imagination.


Selon cet ordre hiérarchique de deux états de conscience, de deux réalités, nous comprenons qu'en fait l'un est imbriqué dans l'autre et c'est à travers la modalité imaginative que s'ouvre d'autres sphères du réel. L'accès à cet altérité imbriquée à notre conscience de veille peut être ouverte accidentellement, c'est la cause des états dits "pathologiques" car la personne ne s'y attendait pas et qu'halluciner une réalité dont la normalité n'existe pas pour notre société, elle ne peut qu'apparaitre que comme pathologique. Alors qu'une conscience préparée à la réception du contenu de la conscience onirique aura des expériences mystiques. Nulle différence entre la première expérience et l'autre, seul le sujet et la société qui l'accueille définira la véracité de cette expérience et prouvera, ou réfutera, ce vécu. Or, c'est une réalité sous-jacente à la conscience de veille qui s'active, comme nous venons de le voir, et interfère avec un autre plan du réel. Le contenu psychique est donc projeté à l'extérieur à l'état de veille au lieu de rester dans ce contenu et d'entrer en activité lors du sommeil. Lorsque nous parlons de psyché, il faut faire une distinction entre la conscience qui l'observe tel un corps et la psyché elle-même, car, en fait la conscience se tient au croisement du corps biologique et de la psyché. Psyché et corps forment un couple à l'image du monde extérieur et du monde intérieur. Ils sont la matière dense et subtile de la conscience dont l'équilibre équivaut à l'échange d'information entre une matière solide et une matière fluide, ou énergétique. C'est de cette manière que les différents états de conscience influencent les deux mondes (psyché et corps), et qu'apparaissent les somatisations, et le pouvoir de la conscience sur ces deux mondes. La conscience se tient dans un intermonde dans lequel la modalité imaginative reçoit toutes les informations provenant du monde extérieur et du monde intérieur, l'imagination offre en images les informations contenues dans les deux mondes.


La conscience n'est donc ni corps, ni psyché, elle est d'une tout autre nature. Nous postulons que sa nature est similaire à celle de la lumière physique, c'est la raison pour laquelle son pouvoir de création, et ce qui la maintient, découle d'une source non locale. Nous sommes ici, tout en état ailleurs simultanément. La Source de notre conscience se tient par-delà l'espace-temps, et de l'ensemble des mondes phénoménologiques. Tel un flux lumineux qui perdure et traverse toutes les couches de réalité, notre conscience s'étale dans un espace-temps, auprès d'un être vivant, et pour ce faire, il croît par palier en imbriquant chaque état de conscience telle une poupée russe. Il y a donc trois états de conscience identifiée: la conscience source, ou universelle; la conscience onirique, ou collective; et la conscience de veille, ou individuelle. A l'inverse de la pensée mécaniste et machiniste de la biologie, et de la médecine, l'homme n'existe pas uniquement sur une horizontalité des évènements, mais il existe sur une verticalité tendant vers un point infini. Nous identifions la conscience universelle comme étant le Soi, l'ultime réalité. Dans ce schéma, il est notoire que le réel est de nature fractale, logarithmique, tout comme notre conscience et c'est pourquoi nous pouvons avoir accès à des informations mémorielles, c'est-à-dire une mémoire universelle dont le gardien n'est autre que le Soi.


La sphère onirique qui s'active à l'état de veille entre en collision avec notre réalité de veille, et au coeur du monde onirique, dont les lois logiques s'attachent plus à l'analogie et le symbole, résonne le monde archétypal. Le monde archétypal est un lieu où réside toutes les essences spirituelles, animatrices de tout ce qui existe, leurs présences se dévoilent soit sous une forme tangible, soit sous une forme subtile. Elles sont à la source de toute vie. Notre être est entièrement animé par ces essences, notre corps est animé par ces mêmes puissances et chaque grain de poussière existe grâce à leurs présences. Ces essences sont similaires à celles que les physiciens dénomment énergie dans leur domaine d'étude, or les physiciens ont un regard tangible sur les phénomènes alors qu'un être vivant sent la présence de cette même énergie d'une manière vivante. C'est comme si nous observions la trace laisser par un animal, objet de la physique, à le fait d'apercevoir l'animal lui-même, objet de la psychologie. Cette analyse nous permet de mettre en corrélation les fonctions biologiques, les états de conscience, l'observation de la matière en physique et une spiritualité vivifiante. Plusieurs branches du savoir se trouvent ainsi articuler de manière cohérente.


Qui sommes-nous? Des essences spirituelles ayant pris forme. Nous sommes de même nature que les archétypes en question, mais à l'inverse de ces derniers, nous sommes constitués de matière dense et solide alors que les archétypes sont constitués de matière subtile et fluide. En somme, nous sommes des images archétypales qui flottent sur un plan du réel, sur une cime tangible, et dont la conscience à la capacité d'interagir avec tous les autres plans du réel, et d'entrer en interaction avec des êtres plus subtils que nous. Ces archétypes prennent la forme qui nous est la plus familière, celle qui appartient à notre milieu psychique, physique et culturelle. Rappelez-vous de la phénoménologie de Jakob von Uexküll, une conscience baigne dans un environnement et tout ce qui s'y manifeste existe pour cette conscience du fait de la co-évolution. C'est de cette manière qu'un archétype s'habillera de matières dont nous sommes nous-mêmes constituées, il apparaitra comme un monstre si notre part obscure ne fut travaillée, ou comme un être numineux lorsqu'une aide nous est offerte. Ces habits en question sont toutes de nature symbolique, sa manifestation même est symbolique, tout ce qui en émane est symbolique. Nous voici établir la distinction entre un archétype et un symbole. En conséquence, chaque être vivant, chaque parcelle de matière en ce monde physique est un symbole à déchiffrer. L'univers est un langage divin, et pour le saisir, il nous faut apprendre son langage, c'est-à-dire le langage symbolique. L'univers à un sens, ma vie à un sens, tout à un sens.


 

Source:


Titre: Jakob von Uexküll

Auteur: Milieu animal et milieu humain

Editions: Rivages


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